COVID ET METFORMINE
30 juin 2023 du Journal International de Médecine
Diabète et Covid 19, des liaisons dangereuses
Depuis son émergence à la fin de l’année 2019, le SARS-CoV-2 a été à l’origine d’une morbidité et d’une mortalité considérables. Alors que l’infection aiguë touche préférentiellement la sphère respiratoire, d’autres atteintes ont été rapportées, précoces ou chroniques, dont la survenue d’un diabète. Il est admis qu’un diabète préexistant constitue un risque de sévérité en cas de Covid-19 et que l’infection virale entraîne un déséquilibre de la maladie diabétique. On ignore toutefois si les altérations métaboliques induites peuvent persister, avec risque d’apparition d’un authentique diabète ultérieur.
Les données à ce sujet étant peu nombreuses, Z Naveed et collaborateurs ont mené une étude à large échelle, au niveau d’une population entière, afin de tenter de préciser l’association entre Covid-19 d’une part, incidence et sévérité d’un diabète secondaire de l’autre. Ils se sont basés sur la British Columbia Covid-19 Cohort qui est une plate-forme de santé publique intégrant de nombreuses données médicales des résidents de la Colombie britannique. Ils ont ainsi identifié une cohorte de personnes testées par RT-PCR pour le SARS-CoV-2, entre le 1er Janvier 2020 et le 31 Décembre 2021. Etaient exclus les sujets avec antécédents de diabète ou ceux dont un diabète était survenu dans les 30 jours suivant le test, ainsi que les résidents en centre de soins de longue durée. Les participants, adultes de plus de 16 ans, à PCR +, ont été appariés à des sujets testés négatifs, dans un rapport de 1 : 4. Le principal paramètre analysé a été l’incidence d’un diabète, insulino ou non insulinodépendant, apparu dans les 30 jours et au-delà suivant la date index, soit celle de positivité du test pour le SARS-CoV-2. L’appariement a pris en compte diverses variables sociodémographiques mais également la situation vis-à-vis du vaccin et l’indice de défavorisation matérielle et sociale. L’analyse statistique a reposé sur un modèle à risques proportionnels Cox.
Une association plus marquée chez les hommes et en cas de Covid sévère
Globalement, la cohorte comprend 210 677 sujets testés positifs pour le SARS-CoV-2 et 1 396 245 sujets négatifs. L’analyse a concerné 629 935 d’entre eux, 125 987 testés positifs vs 503 948 individus non exposés, restés négatifs. Leur âge moyen s’établissait à 32 (IIQ : 25- 42) ans ; 51,2 % sont des femmes. Parmi les sujets exposés il y avait davantage de sujets défavorisés sur le plan matériel et social (22 vs 13 %) et davantage de sujets non vaccinés (75,2 vs 63,2 %). La durée moyenne de suivi est de 257 (102-356) jours ; il a été dénombré 2 472 nouveaux diabètes (0,4 %), dont 608 (0,5 %) chez les sujets exposés au virus et 1 864 (0,4 %) chez les non exposés. Parmi ces nouveaux cas de diabète, les femmes étaient plus nombreuses 1 393 cas (56,4 %) vs 1 079 (43,65 %) chez les hommes. Le taux d’incidence de survenue de la diabète, pour 100 000 personnes-années, a été calculé : il est de façon statistiquement significative plus élevé dans le groupe exposé, de l’ordre de 672,2 (intervalle de confiance à 95 % : 618,7 à 725,6) vs 508,7 (IC : 485,6 à 531,8) dans le groupe non exposé, p < 0,001. Le HR global d’incidence, ajusté, est ainsi de 1,17 (IC : 1,06- 1,28) en cas d’exposition au SARS-CoV-2 vs la non exposition. Le risque d’apparition d’un diabète est net chez les hommes, le aHR se situant à 1,22 (IC : 1,06- 1,40) mais la signification statistique n’est pas atteinte pour les femmes : aHR à 1,12 (IC : 0,99- 1,27). L’incidence du diabète est aussi plus marquée en cas d’infection Covid sévère, le HR étant calculé à 3,29 (IC : 1,98- 5,48) en cas d’admission en soins intensifs et à 2,42 (IC : 1,87- 3,15) en cas d’hospitalisation. Ces associations étaient présentes dans les 2 sexes mais plus marquées chez les hommes. Parmi les patients diabétiques, il y a 784 diabètes insulinodépendants et 1 688 diabètes non insulinodépendants. La fraction de cas de diabète incident attribuable au Covid a été globalement de 3,41 % (IC : 1,20- 5,61) %, là encore plus importante dans le sexe masculin, à 4,75 % (CI : 1,30- 8,20).
Un mécanisme non élucidé…
Ainsi, l’étude de cette cohorte de population entière révèle que le risque de diabète augmente en cas d’infection à SARS-CoV-2, notamment chez les hommes et en cas de Covid sévère. Les résultats de ce travail sont en accord avec ceux de plusieurs études antérieures, dont celle de l’US Dpt of Veterans Affairs qui avait rapporté un HR d’incidence à 1,40 (IC : 1,36- 1,44) pour un suivi de 352 jours, dans une population essentiellement masculine, plus âgée et souvent obèse. La prépondérance masculine constatée pourrait être liée à des réponses immunitaires particulières liées au sexe, une plus grande concentration d’anticorps contre le SARS-CoV-2 étant en règle observée chez les femmes que chez les hommes. A ce jour, les mécanismes physiopathologiques sous tendant l’association infection à Covid-19 / diabète restent très mal connus. Le virus SARS-CoV-2 pourrait directement infecter les cellules β pancréatiques exprimant le récepteur à l’angiotensine 2, avec pour conséquence une augmentation de l’apoptose et une baisse de l’insulinosécrétion. Pourraient aussi intervenir des phénomènes inflammatoires conduisant à la survenue et/ou à l’aggravation d’un diabète.
Les points forts de ce travail tiennent à l’utilisation de données de niveau national, à la prise en compte de facteurs confondants potentiels et à un suivi prolongé. A l’inverse, certaines données n’ont pas été incluses, telles que l’importance de l’obésité ou le degré d’activité physique. Il est aussi envisageable que les sujets atteints par le Covid aient eu plus d’explorations de l’équilibre glycémique que les non infectés. Enfin, au sein du groupe non infecté, certains pouvaient être faux négatifs.
En conclusion, ce travail confirme qu’une infection à SARS-CoV-2 est associée à un risque accru de survenue ultérieure un diabète, ce qui a contribué à une augmentation de 3 % à 5 % des cas à l’échelle d’une population.
Dr Pierre Margent
RÉFÉRENCE
Naveed Z et coll. : Association of Covid-19 Infection with Incident Diabetes. JAMA Netw Open. 2023, 6 (4).e : 238 866.
Du Journal International de Médecine du 23 juin 2023
Publié le 23/06/2023
Covid long, du (bon) côté de la metformine
L'infection par le SARS-CoV-2 peut être à l’origine de symptômes durables plus ou moins sévère et fort hétérogène qui participent à l’émergence d’un syndrome aux contours flous dénommé Covid long. Le diagnostic est évoqué quand les symptômes persistent au moins trois mois (ou réapparaissent au terme de ce laps de temps) après la phase aiguë de l’infection chez des patients qui ont été hospitalisés ou non, selon la définition de l’OMS. Les hypothèses pathogéniques sont nombreuses et difficiles à vérifier, mais la prévalence de ce curieux syndrome apparaît élevée dans la plupart des études épidémiologiques. Si la pandémie a perdu du terrain, il n’en reste pas moins que l’infection peut encore être contractée sans difficulté et que la prévention du Covid long reste cruciale à l’échelon mondial. D’autant qu’en France, selon Santé Publique France, deux millions de patients auraient développé des symptômes justiciables d’un tel diagnostic.
Faut-il considérer la metformine comme un espoir sur ce plan ? Cet antidiabétique oral, le premier à avoir été commercialisé, est investi de nombreuses vertus thérapeutiques depuis quelques années. A cette liste déjà longue, est-il licite d’ajouter un éventuel effet antiviral ?
COVID-OUT : un essai randomisé et beaucoup d’insu
Les résultats d’un essai randomisé multicentrique décentralisé étatsunien appelé COVID-OUTplaident en faveur de ces hypothèses plutôt audacieuses, si l’on se réfère aux espoirs douchés pour d’autres vieux médicaments tels l’hydroxychloroquine ou encore l’ivermectine qui ont fait le buzz au plus fort de la pandémie et de ses vagues successives. Ont été inclus des patients adultes âgés de 30 à 85 ans, tous ambulatoires, souffrant de surpoids ou d'obésité et présentant des symptômes évocateurs de la Covid-19 depuis moins de 7 jours. Le diagnostic de l’infection a été confirmé par la positivité d’un test PCR ou d’un test antigénique dans les trois jours qui ont précédé l’inclusion dans l’étude. Six groupes ont été constitués par randomisation factorielle pour recevoir les traitements suivants à type de « bithérapies » : (1) metformine + ivermectine ; (2) metformine + fluvoxamine ; (3) metformine + placebo ; (4) ivermectine + placebo ; (5) fluvoxamine + placebo ; (6) placebo + placebo. Les participants, les investigateurs, les prestataires de soins et les opérateurs chargés de l’analyse des résultats n’étaient pas informés de l'affectation à tel ou tel groupe, de sorte que la méthodologie relève bel et bien d’une procédure de quadruple insu, rarement utilisée dans les essais thérapeutiques.
Le critère de jugement principal était la prévalence des formes sévères de la Covid-19 au 14e jour de l’étude : les résultats en faveur de l’efficacité de la metformine ont fait l’objet d’une publication antérieure sans grand retentissement, compte tenu probablement de la robustesse moyenne de ce critère de jugement. L’étude a été poursuivie à plus long terme sur une population de laquelle ont été exclus les participants qui n’ont reçu aucune dose des médicaments précités. Le diagnostic de Covid long au sein de cette cohorte a fait partie des critères secondaires préspécifiés, selon une définition qui n’a guère évolué au fil du temps.
Risque de Covid-19 diminué de plus de 40 %
Entre le 30 décembre 2020 et le 28 janvier 2022, 1 431 patients ont été inclus dans l’étude. Sur les 1 323 participants qui ont reçu au moins une dose de médicament, 1 126 [(âge médian 45 ans ; écart interquartile EIQ37-54 ; IMC médian 29,8 kg/m2 (EIQ 27,0-34,2) ; femmes : 43,9 %] ont accepté l’idée d’un suivi à long terme, à partir du 180e jour après l’inclusion. Au total, 564 d’entre eux ont reçu de la metformine et 562 un placebo. Dans la majorité des cas (95 %), le suivi a été d’au moins 9 mois. Dans l'ensemble, 93 (8,3 %) des 1 126 participants déclaraient un diagnostic de Covid long au 300e jour du suivi, un laps de temps qui dépasse largement celui entrant dans la définition de l’OMS.
L'incidence cumulée de ce diagnostic a été de 6,3 % (IC 95% 4,2-8,2) chez les participants qui ont reçu de la metformine et de 10,4 % (7,8-12,9) chez ceux qui ont reçu un placebo identique à la metformine ce qui conduit à un hazard ratio [HR] de 0,59 (IC 95% 0,39-0,89 ; p=0,012). Cet effet bénéfique s’est confirmé au terme de l’analyse des sous-groupes préspécifiés. Lorsque la metformine avait été prescrite dans les 3 jours suivant l'apparition des symptômes, le HR a alors été estimé à 0,37 (IC 95 % : 0,15-0,95). L'ivermectine (HR 0,99, IC 95% 0,59-1,64) et la fluvoxamine (1,36, IC 95 %, 0,78-2,34), pour leur part, n’ont eu aucun effet significatif sur l’incidence cumulée du Covid long.
Une prévention du Covid long ?
Cet essai randomisé en quadruple insu suggère que la metformine est à même de réduire l’incidence du Covid long de 41,3 %, comparativement à un placebo. Un résultat qui cadre quelque peu avec la conclusion d’une publication antérieure (N Engl J Med. 2022;387(7):599-610) : ce médicament semblait bien diminuer l’incidence des formes sévères de l’infection de 42,3 % versus placebo au 14ème jour de suivi (odds ratio [OR] 0,58, IC 95% 0,35–0,94). Il s’agissait cependant d’un critère de jugement secondaire de l’étude COVID-OUT, considéré comme insuffisant pour retenir l’attention à ce moment, le critère principal incluant l’hypoxémie n’étant atteint dans aucun groupe.
Qu’en sera-t-il dans le cas du Covid long ? L’étude est certes bel et bien contrôlée, mais les résultats concernant les critères de jugement secondaires de cet essai de bon aloi ne sont pas à l’abri des critiques et les auteurs en sont conscients, même si le tirage au sort est susceptible d’atténuer les effets statistiques liés aux nombreux biais et facteurs de confusion potentiels. Avant d’envisager un usage thérapeutique de la metformine dans la prévention du Covid long, d’autres études sont à l’évidence nécessaires, même si ce médicament peu onéreux semble faire preuve d’une activité antivirale in vitro et ex vivo, dirigée contre le SARS-CoV-2, ceci à des concentrations jugées raisonnables dans les milieux de culture. D’autres effets biologiques de cet antidiabétique sont également intéressants, autant d’arguments qui incitent à poursuivre les recherches autour de ce médicament ancien qui n’a pas fini de faire parler de lui.
Dr Philippe Tellier
RÉFÉRENCE
Bramante CT et coll. Outpatient treatment of COVID-19 and incidence of post-COVID-19 condition over 10 months (COVID-OUT): a multicentre, randomised, quadruple-blind, parallel-group, phase 3 trial Lancet Infect Dis., 2023publication avancée en ligne le 23 juin;. doi: 10.1016/S1473-3099(23)00299-2.
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21 janvier 2021 Journal International de Médecine
Publié le 21/01/2021
Diabète de type 2 et Covid-19 : encore de bons échos sur la metformine
La metformine est un antidiabétique oral de première génération qui, en plus de ses effets bien établis sur la glycorégulation, est à même de réduire la production de cytokines dans tous les cas, avec également un effet immunomodulateur plus particulièrement chez les femmes. Son profil pharmacologique a suscité un certain intérêt au cours de la pandémie de Covid-19 et une étude rétrospective récente (1 et en lien) montrait une association entre l’exposition à la metformine en cas de diabète et une diminution de la mortalité hospitalière des formes sévères de la maladie uniquement dans le sexe féminin.
Une analyse rétrospective de plus de 25 000 dossiers médicaux électroniques
Une autre étude, tout aussi rétrospective, attire à nouveau l’attention sur ce médicament. Entre le 25 février et le 22 juin 2020 au sein de l’UAB (University of Alabama at Birmingham) situé dans le sud des Etats-Unis, ont été analysés 25 326 dossiers médicaux électroniques dans le but de préciser les caractéristiques des patients et les facteurs associés à la mortalité liée à la Covid-19. Les participants ont été classés en deux catégories selon la positivité ou la négativité du test RT-PCR effectué sur des prélèvements principalement nasopharyngés. Le critère de jugement était la mortalité. Pour minimiser les biais de sélection et rendre les résultats aussi généralisables que possibles, un seul critère d’inclusion a été retenu : un test RT-PCR exploitable. C’est dans le même but qu’un seul critère d’exclusion a été formulé : l’absence de données sur la survie.
Les comorbidités présentes au cours des 12 mois ayant précédé l’inclusion dans l’étude ont été prises en compte : l’obésité a été définie par un indice de masse corporelle (IMC) ≥ 30 kg/m2 et l’HTA par une PA systolique ≥ 140 mmHg et/ ou diastolique ≥ 90 mm Hg. Les taux sériques d’HbA1C ont été traités en tant que variable continue. En ce qui concerne les traitements reçus dans ce laps de temps, l’analyse s’est focalisée sur la metformine et l’insulinothérapie Les données ainsi recueillies ont été traitées au moyen d’une analyse par régression logistique linéaire multiple.
Confirmation d’un possible effet bénéfique de la metformine sur la mortalité des patients, quel que soit le sexe
Comme dans bien d’autres études, le risque de contracter la Covid-19 s’est avéré particulièrement élevé :
(1) chez les Noirs ou Afro-américains : Odds Ratio OR = 2,6 (intervalle de confiance à 95 % IC 95% 2,19-3,10 ; p < 0,0001) ;
(2) en cas d’obésité : OR = 1,93 (IC 95% 1,64-2,28 ; p < 0,0001) ;
(3) en cas d’hypertension artérielle : OR = 2,46 (IC 95% 2,07-2,93 ; p < 0,0001) ;
(4) en cas de diabète : OR = 2,11 (IC 95% 1,78-2,48 ; p < 0,0001).
Comme prévu, le diabète a été associé à une surmortalité majeure, l’OR correspondant étant de 3,62 (IC 95% 2,11-6,2 ; p < 0,0001), indépendamment des autres facteurs de risque tels l’âge, l’ethnie, le sexe, l’obésité et l’hypertension artérielle.
Rien de nouveau … si ce n’est un effet apparemment bénéfique de la metformine sur la mortalité liée à la Covid-19, l’OR étant en effet estimé à 0,33 (IC 95% 0,13-0,84 ; p=0,0210) pour les patients des deux sexes.
Cette étude rétrospective qui porte sur plus de 25 000 participants confirme l’implication des facteurs associés au risque de contracter la Covid-19 et à sa mortalité. Le diabète de type 2 et l’obésité sont en première ligne comme il est désormais classique. Le seul élément nouveau, c’est l’effet protecteur de cet antidiabétique oral de première génération qui reste évidemment à être confirmé, compte tenu de la méthodologie et des réserves multiples qu’elle suscite.
Ces résultats n’en font pas moins écho à ceux de l’autre étude rétrospective évoquée suggérant que l’exposition à la metformine était associée à une réduction de la mortalité hospitalière de la Covid-19 uniquement chez les femmes diabétiques atteintes d’une forme sévère de la maladie. Dans l’étude de l’UAB, le bénéfice semble concerner les deux sexes ce qui est nouveau, mais ces hypothèses restent tout de même bien fragiles … dans une étude comme dans l’autre. Peut-être est-il temps d’envisager une étude randomisée?
Dr Philippe Tellier
RÉFÉRENCES
Crouse AB et coll. Metformin Use Is Associated With Reduced Mortality in a Diverse Population With COVID-19 and Diabetes. Frontiers in Endocrinology 2021 ; publication avancée en ligne le 13 janvier. doi: 10.3389/fendo.2020.600439.
1) Bramante CT et coll. : Metformin and risk of mortality in patients hospitalised with COVID-19: a retrospective cohort analysis. Lancet Healthy Longev 2020 ; publication avancée en ligne le 3 décembre. doi.org/10.1016/ S2666-7568(20)30033-7.
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9 décembre 2020 Journal International de Médecine
Publié le 09/12/2020
Covid-19 : la metformine pourrait réduire la mortalité pour les femmes diabétiques
Parmi les facteurs de risque qui prédisposent aux formes sévères de la Covid-19, figurent en bonne place l’obésité et le diabète de type 2. Ces deux maladies ont en commun une inflammation systémique chronique qui n’est sans doute pas étrangère à cette association. L’obésité s’associe d’ailleurs souvent à une insulinorésistance ou à une hyperglycémie chronique.
La metformine est un antidiabétique oral de première génération qui, en plus de ses effets sur la glycorégulation, est capable de réduire la production de cytokines dans les deux sexes, tout en exerçant un effet immunomodulateur qui serait propre au sexe féminin. C’est ainsi que la metformine diminue la sécrétion de TNFα et d’IL-6 tout en renforçant celle d’IL-10, autant d’effets biologiques qui seraient plus prononcés chez la femelle dans les modèles animaux et il en irait de même dans l’espèce humaine. Ce profil pharmacologique pourrait alors répondre au moins en partie aux mécanismes pathogéniques qui contribuent à la sévérité de l’infection virale, tout au moins en cas de diabète de type 2 ou d’obésité, des états métaboliques où la production d’adipocytokines par la graisse viscérale abondante peut être fortement activée.
Rétrospective sur plus de 6 000 patients diabétiques avec Covid-19
Cette hypothèse est à l’origine d’une étude de cohorte rétrospective étatsunienne qui a reposé sur la base de données Clinical Discovery de l’UHG (United Health Group). Pour être éligibles, les patients adultes devaient être atteints d’un diabète de type 2, être inclus dans la base précédente depuis au moins 2019 et être hospitalisés en raison d’une Covid-19 confirmée par PCR. Le critère de jugement principal était la mortalité hospitalière liée à la maladie. La variable d’intérêt indépendante était l’exposition à la metformine au moins pendant au moins 90 jours au cours de l’année qui a précédé l’hospitalisation. Les covariables prises en compte ont inclus les comorbidités, les médicaments, les données démographiques et l’état fédéral d’origine. L’hétérogénéité de l’effet a été évaluée en fonction du sexe. Le risque de décès a été estimé au moyen de la méthode des risques proportionnels de Cox et un appariement des patients exposés ou non à la metformine a été effectué au moyen du score de propension par régression logistique multiple.
Entre le 1er janvier et le 7 juin 2020, 6 256 patients, dont 3 302 (52,8 %) femmes, ont été considérés comme éligibles.
L’exposition à la metformine n’a été associée globalement à aucune diminution significative de la mortalité, le hazard ratio [HR] étant de 0,887 [intervalle de confiance à 95 % IC95% 0,782–1,008]) dans la cohorte non appariée, versus un odds ratio [OR] de 0,912 [IC 95% 0,777–1,071], p = 0,15) dans les groupes appariés selon le score de propension.
Les femmes sous metformine s’en sont mieux « sorties »
En revanche, chez les femmes, l’exposition à la metformine a été associée à une diminution de la mortalité, les valeurs correspondantes de l’HR et de l’OR étant respectivement de 0,785, (IC 95% 0,650–0,951) et de 0,759 (IC 95% 0,601–0,960, p = 0,021). Aucun effet de ce type n’a été observé pour les hommes, le HR étant en effet de 0,957 (IC 95% 0,82–1,14; p = 0,689).
Ces résultats sont à prendre avec la plus grande prudence car il s’agit d’une étude strictement rétrospective et la méthode du score de propension a ses limites. La metformine réduit-elle vraiment la mortalité des femmes atteintes d’obésité sévère/morbide ou de diabète de type 2, hospitalisées en raison d’une forme sévère de la Covid-19 ? Seules des études randomisées permettront de répondre à cette question et de transformer une simple association en lien de causalité. Si tel était le cas, ce serait une bonne nouvelle, car la metformine est un médicament à la fois largement distribué, bien toléré et peu onéreux. Une autre inconnue : la metformine conserve-t-elle son efficacité supposée quand elle est administrée au début de l’hospitalisation ? La question mérite d’être posée car le médicament est en règle interrompu au moment de l’admission pour laisser la place à une surveillance étroite de la glycémie et à une éventuelle insulinothérapie en fonction de l’évolution de la maladie et de son retentissement sur le diabète.
Dr Philippe Tellier
RÉFÉRENCE
Bramante CT et coll. : Metformin and risk of mortality in patients hospitalised with COVID-19: a retrospective cohort analysis. Lancet Healthy Longev 2020 ; publication avancée en ligne le 3 décembre. doi.org/10.1016/ S2666-7568(20)30033-7.
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16 mai 2020 Journal International de Médecine
Publié le 16/05/2020
Diabète et Covid-19, une association à haut risque
Le diabète fait partie des comorbidités qui aggravent nettement le pronostic du Covid-19. En 2019, cette affection métabolique touchait 463 millions d’individus dans le Monde, le diabète de type 2 étant de loin le plus représenté. S’il n’est pas assuré que ce dernier augmente la susceptibilité à l’infection par le SARS-CoV-2, en revanche de nombreuses études ont souligné son association fréquente aux formes les plus sévères du Covid-19 et à leur mortalité.
La première méta-analyse
Une méta-analyse récente et bienvenue -c’est même la première- confirme cette notion tout en donnant une estimation des risques encourus. Une revue des principales bases de données a permis de sélectionner trente études regroupant au total 6 452 patients atteints à la fois d’un diabète- le plus souvent de type 2- et d’un Covid-19. Le critère de jugement combinait tous les éléments d’un pronostic défavorable : mortalité, forme sévère de la maladie, syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), passage en unité de soins intensifs (USI) ou encore aggravation du Covid-19.
Davantage de formes graves et de mortalité
La méta-analyse a révélé que le critère combiné précédent était étroitement associé au diabète, le risque relatif (RR) correspondant étant en effet estimé à 2,38 (intervalle de confiance à 95 % IC 95 % [1,88-3,03], p < 0,001; I2: 62 %). Il en va de même pour chaque élément de ce critère pris isolément : (1) mortalité : RR 2,12 [1,44-3,11], p < 0,001; I2: 72 %) : (2) formes sévères de la maladie : RR 2,45 [1,79- 3,35], p < 0,001; I2: 45%) ; (3) SDRA : RR 4,64 [1,86-11,58], p = 0,001; I2: 9 %) ; (4) aggravation de la maladie : RR 3,31 [1,08-10,14], p = 0,04; I2: 0 %). L’hétérogénéité significative des études doit être prise en compte pour nuancer ces chiffres notamment pour ce qui est de la mortalité.
HTA et âge brouillent les cartes
Une analyse par méta-régression a par ailleurs révélé que l’association entre diabète et Covid-19 était modulée à la fois par l’âge (p = 0,003) et l’existence d’une hypertension artérielle (p < 0,001). L’étude par sous-groupes indique que la force de l’association diabète-Covid 19 grave est moindre en cas d’âge médian ≥ 55 ans (RR 1,92) par rapport aux patients de moins de 55 ans (RR 3,48), une notion déjà mise en exergue dans d’autres publications portant sur des séries conséquentes de malades. Il en va de même dans les sous-groupes avec une prévalence de l’HTA élevée ≥ 25 % : le RR n’est que de 1,93 alors qu’il atteint 3,33 quand elle est < 25 %. L’association est donc moins marquée chez les patients diabétiques âgés ou hypertendus.
Cette méta-analyse qui porte sur 30 études regroupant près de 6 500 patients quantifie de manière synthétique mais approximative l’impact négatif du diabète sur le pronostic du Covid-19. La mortalité, la fréquence des formes sévères de la maladie ou encore la probabilité de son aggravation sont indéniablement plus élevées en cas de diabète sous-jacent : une notion désormais classique qui est ici confortée par les chiffres.
Dr Philippe Tellier
RÉFÉRENCES
Huang I et coll. : Diabetes mellitus is associated with increased mortality and severity of disease in COVID-19 pneumonia - A systematic review, meta-analysis, and meta-regression. Diabetes Metab Syndr., 2020; 14(4): 395-403. doi: 10.1016/j.dsx.2020.04.018.
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Date de dernière mise à jour : 25/06/2024
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