Dans le JIM du 30 juillet 2025
Polluants éternels et protections périodiquesPolluants éternels et protections périodiques réutilisables
Juliette Seblon | 30 Juillet 2025
Les protections périodiques réutilisables connaissent un succès grandissant. Un nombre croissant de jeunes femmes sont en effet séduites par des protections qui sont considérées comme moins polluantes et donc moins susceptibles d’exposer les utilisatrices à des substances chimiques redoutées (même si les risques ne sont pas toujours bien évalués). Pourtant, comme c’est parfois le cas avec les produits présentés comme « moins dangereux », des données récentes incitent à un certain recul. Une étude menée par des chercheurs de l’Indiana University et de l’Université de Notre Dame révèle en effet la présence de substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), aussi appelées « polluants éternels », dans près d’un tiers des protections féminines réutilisables analysées, sans cependant qu’il soit possible de déterminer le risque associé à cette identification. Ces résultats ont été publiés le 22 juillet 2025 dans Environmental Science & Technology Letters
Une contamination détectée dans plusieurs types de produits
Les chercheurs ont examiné 59 produits d’hygiène intime réutilisables, dont des culottes menstruelles, des serviettes lavables, des coupes menstruelles et des protections pour incontinence, provenant d’Amérique du Nord, du Sud et d’Europe. Dans près de 30 % des échantillons, ils ont détecté des niveaux de PFAS compatibles avec une utilisation intentionnelle lors de la fabrication. Ces substances chimiques, réputées pour leur persistance dans l’environnement et dans l’organisme, n’avaient jusqu’ici jamais été identifiées dans ce type de produits.
Le professeur Marta Venier, co-autrice de l’étude, insiste sur la nécessité de mieux encadrer la composition de ces produits qui sont en contact prolongé avec la peau, notamment chez les adolescentes et les jeunes femmes, plus sensibles aux perturbateurs endocriniens et aux effets à long terme d’une exposition cutanée. À ce jour, les effets dermatologiques des PFAS, et en particulier de leurs formes neutres, sont encore mal documentés, mais certains chercheurs invitent à la prudence.
Des substances persistantes
Parmi les composés identifiés, le 8:2 FTOH (fluorotelomère alcool) était particulièrement fréquent dans les produits du marché nord-américain. Ce composé, déjà volontairement retiré des emballages alimentaires par les fabricants en accord avec la FDA en raison de sa persistance dans l’organisme, peut se transformer en PFOA, un agent chimique classé comme toxique. La présence de cette molécule dans des protections intimes peut susciter l’inquiétude, d’autant que des alternatives sans PFAS existent déjà, comme le montre la présence d’échantillons exempts de contamination dans chaque catégorie de produits testés.
Une fausse bonne solution écologique ?
Souvent plébiscités pour leurs avantages écologiques par rapport aux produits jetables, les dispositifs d’hygiène féminine réutilisables ne semblent donc pas sans impact écologique. Une fois jetés, ils finissent inévitablement dans les décharges où les PFAS peuvent s’infiltrer dans les sols et les nappes phréatiques, prolongeant leur cycle de pollution. Ces produits ne représentent donc pas forcément une solution durable si leur fabrication repose sur des substances indestructibles.
Les auteurs de l’étude plaident pour une meilleure transparence de la part des fabricants. Actuellement, la composition complète des produits n’est pas toujours indiquée sur les emballages, laissant les consommateurs dans l’ignorance des substances auxquelles ils sont exposés. Pour Sydney Brady, doctorante et co-auteure, il est essentiel que le public puisse faire des choix éclairés, notamment pour des produits aussi intimes.
Date de dernière mise à jour : 04/08/2025
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