Le site de Jacques Chevalier

SudInfo 5 septembre 2025

Au coeur du MaRécage

Décryptage de « l’affaire De Maegd » : il y a un malaise au MR, mais il n’y aura pas de putsch, ni de guerre des clans

Le député Michel De Maegd a taclé très durement son président sur les réseaux sociaux : c’est moins le président que ses méthodes que certains libéraux remettent en cause.

Décodage

Par Didier Swysen

Journaliste à la rédaction GénéralePublié le 05/09/2025 à 07:15

Coup de tonnerre au MR, un de plus : cette longue séquence estivale qui n’en finit pas et qui agace. « On n’en peut plus de cette séquence qui a duré tout l’été et qui ne nous présente pas sous un bon jour», dit ce libéral qui compte, selon la formule anonyme consacrée. «Georges-Louis aurait dû couper court à la saga de la carte PMR. Il est temps d’en revenir aux dossiers importants et aux réformes que nous avons lancées ». Il est un fait que cela n’a pas arrêté : la saga de la carte PMR, l’engueulade « menaçante » avec la journaliste de la RTBF (même si au MR, on est unanime pour dénoncer l’attitude de la RTBF qui a enregistré le président à son insu et a publié une petite partie de l’enregistrement), le coût de sa bagnole et la petite vidéo où il se met en scène, la nomination de sa compagne à l’ONE, sa volonté d’être nommé au circuit de Spa-Francorchamps, la sortie de Frédéric De Gucht, candidat à la présidence de l’Open VLD, qui trouve que GLB glisse un peu trop vers le populisme.… Et maintenant, la sortie du député De Maegd qui tacle fortement le président sur la démocratie interne au MR. Cela fait beaucoup, en effet.

L’incident avec Michel De Maegd ressemble plus à une tempête dans un verre d’eau qu’à une fracture interne au MR

Tempête dans un verre d’eau ou fracture interne au MR ? Il y aurait peut-être une fracture interne si ceux qui se plaignent volontiers de la manière dont se comporte le président le faisaient à visage découvert… Mais cela n’a pas vraiment été le cas jusqu’ici et rien ne laisse penser que « l’affaire De Maegd » est la goutte d’eau qui fera déborder la patience de certains et qui éclaboussera Georges-Louis Bouchez. « Pour cela, il faudrait que le ras-le-bol soit suffisamment fort et qu’il soit généralisé », nous dit cet insider qui doute que ce soit le cas. Qui pourrait taper du poing sur la table ? Qui pourrait le challenger ? Un seul nom revient, celui de Sophie Wilmès, l’ancienne Première ministre devenue vice-présidente du Parlement européen et forte d’un triomphe électoral (plus de 500.000 voix) en juin 2024… Mais rien ne laisse penser qu’elle va intervenir. « Il sait qu’elle est la seule qui peut le faire plier, mais il a pris bien soin de faire monter sa génération, de s’entourer de ses fidèles et de « faire disparaître du paysage » tous les anciens qui pouvaient le challenger. Une fronde est toujours possible, mais toutes les tentatives de l’encadrer ont jusqu’ici échoué. » Tempête dans un verre d’eau donc ?

Georges-Louis Bouchez réagit à la publication du député MR Michel De Maegd : « Nos concitoyens attendent autre chose de la...

 

La réaction du député Michel De Maegd était-elle légitime ? On peut difficilement douter de la probité ou des convictions de Michel De Maegd. Il prétend mordicus avoir défendu avec la plus grande loyauté l’accord obtenu par le vice-Premier MR, David Clarinval, en utilisant le verbatim validé par le président. Il s’inquiète pour la démocratie interne au MR et il l’a déjà dit en interne, prétend-il, mais comme rien ne bouge… Venu de la société civile, Michel De Maegd est un ancien journaliste et pas un pur produit de la politique dont il ne maîtrise ou ne veut pas maîtriser tous les codes. On lui reproche d’avoir lavé le linge sale publiquement plutôt qu’en famille et d’avoir ainsi fait le jeu des adversaires du MR. On peut comprendre que toute la séquence ait meurtri l’intéressé, mais on ne peut pas nier que « le déploiement stratégique des élus en fonction des débats » appartienne au chef d’équipe. Un peu comme l’entraîneur de football qui est libre de laisser son gardien titulaire sur le banc pour en faire jouer un autre. Georges-Louis Bouchez a décidé et, que ça déplaise aux uns ou aux autres, c’était son droit le plus strict.

Personne ne conteste le président, mais ce sont ses méthodes qui inquiètent plus d’un libéral

Michel De Maegd doit-il craindre pour son avenir au MR ? « Au MR, il y a une très grande faculté à entendre tous les avis ; ce n’est certainement pas au PTB ou même au PS que l’on verrait ça », tranche ce libéral qui n’imagine pas un instant que cette sortie conduira le député De Maegd à l’échafaud. « Une exclusion de facto n’arrivera pas », renchérit cet autre. « Pour quelle raison ? Pour crime de lèse-président ? Évidemment, cela peut être plus subtil, mais ce serait une erreur, car Michel est un bon député, un atout pour le MR. » Reste à voir ce que décidera l’intéressé. Il veut que les choses bougent au MR où il en tirera ses conclusions, dit-il. Pourrait-il démissionner ou siéger comme député indépendant ? Rien ne semble impossible.

Georges-Louis Bouchez agace-t-il en interne ? Pourrait-il être la victime d’un putsch ? Dans une série de réactions, on sent effectivement un certain agacement, de l’inquiétude, de la peur aussi; quelques-uns évoquent même un harcèlement lorsqu’ils ne partagent pas son point de vue… Morceaux choisis : « On ne peut plus rien lui dire », « Il n’écoute plus personne, seul son avis compte », « Il croit qu’il a gagné seul les élections, qu’il détient la vérité ». Il faut être sourd pour ne pas entendre ce malaise qui étreint plus d’un libéral. De là à évoquer un putsch ? Non, ça ne semble pas du tout à l’ordre du jour. C’est moins le président que ses méthodes que certains remettent en cause et rien ne prouve que c’est là le sentiment d’une majorité de libéraux. « Nous ne voulons évidemment pas le remplacer, nous ne remettons pas son talent en question, mais nous aimerions simplement qu’il prenne conscience qu’il doit se remettre en question sur la méthode. Pour le bien de tous. » Là, ce n’est pas gagné…

Clash au MR : Michel De Maegd persiste et signe, « si rien ne change au MR, j’en tirerai les conclusions »

Moins de 24 heures après son message sur les réseaux sociaux taclant fortement son président de parti, le député fédéral bruxellois se dit serein et ne retire pas un mot.

Mercredi soir, le député fédéral Michel De Maegd (MR) a été remplacé par son collègue Denis Ducarme au débat QR de la RTBF. « Comme l’a précisé Sacha Daout à l’antenne, j’aurais dû y participer, en tant que vice-Président de la Commission des Relations extérieures pour y aborder la question de la reconnaissance de la Palestine. Mais, au dernier moment, le président de mon parti m’a imposé de ne pas m’y rendre, estimant, je cite, que je ne « représente pas la ligne du parti sur ce point ».

« Dérive autocratique »

C’est le début d’un message que le député a publié mercredi soir sur les réseaux sociaux et qui va rapidement glisser de la reconnaissance de la Palestine à la démocratie interne au MR. « Après six années à la Chambre, je ne peux que m’indigner face à cette dérive autocratique inquiétante et à la mainmise présidentielle sur la démocratie interne au sein de mon parti : empêcher un parlementaire de s’exprimer, alors même qu’il défend la ligne validée par nos représentants gouvernementaux, est pour moi inconcevable. Cette façon de présider, centrée sur les tentatives incessantes de contrôle absolu des parlementaires et des différents médias, ne correspond ni aux valeurs libérales, ni à l’esprit humaniste qui m’animent depuis mon engagement au sein du Mouvement réformateur. »

« J’ai défendu avec la plus grande loyauté l’accord obtenu par David Clarinval et je déplore que certains mettent en doute ma probité»

Michel De Maegd, Député fédéral MR

M. De Maegd dit rester profondément attaché aux idéaux de liberté et de respect, qui sont au cœur du libéralisme. « Le libéralisme se fonde sur la démocratie et non sur une présidencratie. Se taire serait céder à l’oppression. Le dénoncer, c’est rester fidèle à ma dignité et aux valeurs qui fondent mon engagement politique. J’en appelle donc à un sursaut des démocrates du MR : il est urgent de retrouver les valeurs de notre mouvement et de réaffirmer notre attachement à un véritable débat démocratique. »

 

Boucs.PNG

Georges-Louis Bouchez réagit à la publication du député MR Michel De Maegd : « Nos concitoyens attendent autre chose de la...

 

Moins de 24 heures plus tard, le député n’enlève pas un mot même s’il dit qu’il continuera à s’exprimer à ce sujet en interne. « J‘ai défendu avec la plus grande loyauté l’accord obtenu par notre vice-Premier, David Clarinval. Une position que j’ai tout aussi loyalement rappelée tant dans les médias qu’au Parlement, aujourd’hui, après validation de M. Clarinval, mais aussi du président lui-même. »

Bouchez réagit

Il déplore néanmoins que certains (il vise Denis Ducarme qui le remplaçait au débat et son président) mettent en doute sa probité. Craint-il pour son avenir au MR ? Serait-il tenté de partir ailleurs ? Ou de siéger dorénavant comme indépendant ? Il dément la rumeur qui l’envoie chez Les Engagés. « Tout ce que je peux dire, c’est que je tirerai les conclusions s’il n’y a pas de volonté de changement au MR. »

Georges-Louis Bouchez n’a pas souhaité en dire plus que sa réaction donnée… à la RTBF, le média qu’il menace pourtant de boycott. « Chaque jour et depuis six ans que je suis président, je lis des mots totalement disproportionnés, des choses totalement infondées. Ça ne m’empêche pas d’avancer parce que moi, je travaille dans l’intérêt de notre population. Je laisse à chacun les excès. Moi, je travaille sur le fond. Nos concitoyens attendent autre chose de la part des élus bien payés que de pleurnicher pour l’un ou l’autre débat. »

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 05/09/2025

  • Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !