Enfin, la question du pouvoir d’achat est très présente. Une partie des doléances témoignent des fins de mois difficiles et qui arrivent de plus en plus tôt. « C’est quelque chose qui est resté présent dans l’actualité et dans les différentes mobilisations qui ont suivi le mouvement des Gilets Jaunes », affirme la sociologue. Notamment lors du mouvement social contre la réforme des retraites.
Face à ces cahiers à spirale, plusieurs auteurs ont évoqué leur quotidien. Cette Perpignanaise décrit sa vie avec les 480 euros mensuels du RSA. « Me voilà à 60 ans, j’ai tout essayé pour m’en sortir ». L’autrice veut « des contrôles plus sévères pour ceux qui exagèrent et plus d’aides pour ceux qui souhaitent ne pas mourir au RSA ». À Perpignan aussi, Joséphine s’exaspère : « comment je n’ai que 280 euros par mois pour vivre ? » Visiblement à la retraite, elle demande la suppression de la CSG pour les retraites, et la baisse des taxes sur le carburant, le gaz et l’électricité.
Les cahiers citoyens : un objet polémique
Selon Mathilde Pette, il existe une controverse autour du traitement des carnets de doléances. L’association Rendez les doléances ! milite pour un accès ouvert et totalement libre aux revendications. « Je trouve la formule intéressante car elle suggère que les doléances n’appartiennent pas à l’État, mais à leurs auteurs », relève Mathilde Pette. « Il y a des militants, des Gilets Jaunes et des membres de cette association qui affirment que les cahiers de doléances étaient cachés aux archives », souligne-t-elle.
En décembre 2024, l’Association des archivistes français rappelait dans un communiqué que : « loin d’être cachés ou perdus dans les services publics d’Archives, les cahiers citoyens, pris en charge et inventoriés par les professionnels, y sont depuis accessibles dans le respect de la législation, garante à la fois de la transparence administrative et de la protection des droits individuels. »
Depuis 2019, de nombreux chercheurs se sont emparés de cette matière. Aujourd’hui, la plus large diffusion des cahiers de doléances vise à donner plus de visibilité à ces précieux documents. S’il est important que ces cahiers de doléances soient analysés, les individus qui ont participé à leur rédaction attendent des actions concrètes.
Un appel à bloquer le pays en septembre
Il y a six ans, Alexandre déposait ses doléances, sans savoir ce que les cahiers allaient devenir. « Quand c’est arrivé, je me suis dit qu’il fallait le faire, même si ça allait échouer », nous confie-t-il, un peu désabusé. En 2025, rien n’a vraiment changé selon lui. Si le prix du carburant est légèrement plus bas qu’à l’époque, il constate « une explosion de la pauvreté » et des « inégalités. » Les doléances sur la fiscalité, la justice sociale, le privilège des élus ou le retour de l’ISF sont loin d’être à l’agenda politique. L’ex Gilet Jaune pointe aussi du doigt l’absence de démocratie.
Dernièrement, la pétition contre la loi Duplomb a dépassé les deux millions de signatures. Si un débat inédit est prévu devant le Parlement, celui-ci sera sans vote. « La population se positionne, mais elle n’est toujours pas écoutée. Je trouve cela désespérant », se désole Alexandre.
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